Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/176

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

postérieur dans le sable, qui étions entraînés vers la rivière par un crocodile. C’était un véritable monstre.

— Mais pourquoi les tuez-vous à la hache ?

— Parce que c’est plus sûr qu’une balle de carabine dans l’œil et ça revient moins cher.

Nous préparons le repas de midi sur une plage couverte de squelettes de poissons et de carapaces de tortues. Des chercheurs de diamants ont dû faire halte ici.

A notre arrivée, la fuite d’un sucuri qui étire d’une coulée ses huit à dix mètres sur le limon, me laisse pantois. Aux dires de Pablo, les Indiens de la région apprécient la chair de ce reptile qui, après tout, n’est qu’une anguille de forte taille, connu par les savants sous le nom de « euneste murinas ».

En gage d’amitié ou d’estime, certaines tribus offrent à l’explorateur affamé des tranches grillées du reptile, arrosées d’une liqueur appelée « calushi », préparée par les femmes indiennes qui crachent dans une calebasse la salive abondante produite par la mastication de graines et d’herbes spécialement cueillies dans la forêt.

Après la fermentation, le breuvage — toujours d’après Pablo, qui a failli se faire scalper plus d’une fois à courir la brousse — est gazeux, rafraîchissant, à peine alcoolisé.

Nous achevons de déjeuner, lorsque une pirogue indienne, longue d’une dizaine de mètres, fait son apparition. Un seul homme assis à l’arrière la dirige. Nous lui faisons de grands signes et avec lenteur la pirogue accoste. L’Indien, méfiant, se tient sur la défensive. Meirelles, en quelques mots de « guarani », le rassure et l’invite à partager nos restes. L’indien se baisse et puise