Page:Maufrais Aventures au Matto Grosso 1951.djvu/175

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Le chasseur avait abattu un superbe crocodile et se préparait à lui retirer le cuir, lorsque le saurien, blessé à mort, le happa à la cuisse dans un dernier sursaut et ne voulut point démordre. Les chairs broyées, saignant abondamment, l’homme dut s’épuiser vainement à tenter de se dégager de l’étreinte mortelle du « jacaré »[1], mais sans y parvenir et l’hémorragie aidant, il perdit connaissance pour ne plus se réveiller et mourir ainsi, la cuisse prise par les mâchoires du crocodile que la mort avait soudées à l’homme. Ses amis creusèrent un trou dans le sable et déposèrent les ossements, comme ils les avaient trouvés.

— C’est dangereux de chasser le crocodile quand on est tout seul, dit encore Sandro…

— Lorsque j’étais gamin, je partais souvent avec une troupe de chasseurs. Nous poursuivions les jacarés sur une plage en essayant de les rabattre dans une sorte de cirque fermé de pieux. Après ça on leur fracassait le crâne à grands coups de hache. Il faut être agile et sauter vite pour éviter les mâchoires ou les coups de queue qui assomment un homme ou lui brisent les os. Un de mes amis a en le bassin fracturé par une détente de la queue d’un jeune crocodile. Ça l’a coupé sur ses jambes et il est tombé évanoui aussitôt.

Parfois aussi on les chasse au lasso. On cache les cordes dans le sable et on met de la viande pourrie alentour. Lorsque les sauriens s’approchent, on tire la corde et on les attrape par les pattes. Après, naturellement, on les achève à la hache. Une fois, nous étions douze, le

  1. Crocodile brésilien.