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l’inévitable fricassée de farine et de viande sèche, arrive à point nommé pour nous plonger dans une écœurante mais exquise hébétude.

Le Rio est subitement silencieux, morne, un orage gronde qui envahit le ciel et le couvre de lourds nuages noirs. C’est la pluie à brève échéance. Il n’est pas très indiqué de repartir maintenant. Nous allons passer la nuit sur la plage, mais comme il n’y a pas d’arbres auxquels nous puissions accrocher les hamacs, nous creusons des trous rectangulaires dans le sable chaud et tendons aux quatre coins, sur des piquets élevés à cinquante centimètres du sol, des moustiquaires et des bâches qui forment des tentes-tombeaux chères au cœur des campeurs solitaires.

Le creux du sable tapissé des ponchos assure le confort de ces petits abris blafards que le vent commençant à souffler enfle et désenfle en leur donnant une vie sur naturelle. Je calfeutre les bords de mon abri avec du sable tassé recouvert de gros galets et nous décidons avec Meirelles que, si la pluie tombe dans la nuit, nous nous replierons dans la barque qui est amarrée à une grosse racine à quelques mètres de la plage.

Nous sommes assis en rond autour du feu, enveloppés dans nos ponchos, car la température fraîchit.

Duke va laver la grosse marmite de fer, qui a servi à faire cuire du riz et, de l’eau jusqu’aux genoux, il en profite pour s’asperger le visage. Sandro va l’imiter, lorsque soudain on le voit reculer en même temps qué Duke qui pousse un cri et se jette en arrière dans le sable, pleurant et geignant. Il se tord de douleur et serre avec force son