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mètres (ce qui sera la moyenne journalière de notre chevauchée) nous arrivons à une cabane de trafiquant de peaux, relais des solitaires — très rares — qui s’aventurent dans cette région, objectif des incursions indiennes qui, à chacun de leurs passages migratoires, la brûlent après l’avoir pillée, mais que l’infatigable ténacité de son propriétaire fait renaitre de ses cendres.

Il obéit on ne sait à quel mobile, car il est seul habitant d’une portion de terres incultes dont la superficie égale au moins celle de dix départements français, sinon plus.

On n’y trouve d’ailleurs rien à manger ni à boire. mais c’est un relais tout de même, parce qu’il est coutume de s’y arrêter et que l’on y échange des nouvelles.

Les « caboclos » s’installent aux environs de la cabane. Le trafiquant nous offre une place auprès de son feu et nous causons.

Petit, barbu, très maigre, ne payant pas de mine, mais possédant une bonne fortune à Rio de Janeiro, depuis trente ans, Sandro s’aventure aux quatre coins du Matto Grosso pour acheter des peaux, aussi bien chez les fermiers et les chercheurs de diamants que chez les Indiens dont il parle le dialecte. Il négocie ensuite les cuirs de pumas, de crocodiles ou d’antilopes à Leopoldina où, une fois par an, il va se ravitailler en vivres et en munitions. Les bénéfices de la vente sont appréciables : Sandro pourrait, s’il le désirait, se retirer des affaires, mais cette vie aventureuse est sa raison d’être. Il la continuera jusqu’à sa mort. Nous lui apprenons l’accident survenu à notre porteur et il hoche la tête.