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quelques troupeaux d’antilopes qui fuient à notre approche.

Les chevaux ruent sous les piqûres d’énores guêpes qui les harcèlent, hennissant de douleur, ils menacent de s’emballer. Je calme Clairon de mon mieux et promène sur son pelage ruisselant de sueur des rameaux feuillus. Mais ces sales bestioles reviennent toujours, ivres de sang, d’une hardiesse étourdissante, s’inscrustant sur les poils du cheval comme des tiques. Je souffre pour ma monture qui tremble sous l’élancement des terribles aiguillons et, au risque d’être désarçonné, me livre à un combat épique pour la soulager.

Le soleil maintenant très haut dans le ciel, brûle.

Combien ont rêvé de semblables chevauchées dans la pampa (un peu comme au cinéma), la carabine au travers de la selle et le poncho sur les épaules ? Combien différente est la réalité ! Bien vite commence le désenchantement : l’ennui, la fatigue d’abord, la soif ensuite, puis la faim, la faim surtout, car farine et viande sèche sont rationnées. Sans doute en prévoyance de sombres événements.

Adieux beaux rêves, adieu cow-boy, chevauchée héroïque…

Le ventre creux, le dos voûté, tu chemines en silence et comme tout le monde, au lieu de gigot rôti dans sa graisse, tu mâches et tu remâches une viande sans saveur accompagnée d’une farine pailleuse, caillouteuse, abominable.

Le gibier à poils ou à plumes est rare dans la pampa. De toute manière il faudrait avoir le temps de le chasser et des munitions à gaspiller. Ce qui n’est pas notre cas.

A dix heures du soir, après avoir fait cent dix kilo-