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du à la ceinture de Canario qui ne semble pas s’en inquiéter outre mesure. Question d’habitude peut-être, mais voici trois mois qui’il n’a rien trouvé. La terre est riche pourtant, pas de chance, voilà tout.

Assis sur le sable, Canario, Sylvio et le gamin puisent à pleines mains dans un sac de farine et décortiquent des lamelles de viande séchées au soleil. Je m’associe et mange avec eux.

Dans la cahute, la femme plume un canard pris à la résine des pièges que les enfants vont tendre à la tombée du jour.

Sayança fume son éternel cigare attaché avec une ficelle. Ses yeux regardent je ne sais quoi. La fille de Canario a disparu. Manoel aussi, avec ma carabine. A intervalles réguliers, les détonations roulent sur la rivière.

— Sayança… nous partons ce soir.

— Si senhor… vamos.

Manoel est revenu de la chasse bredouille, mais tout le chargeur de ma carabine y est passé. Puis nous sommes partis, laissant Canario et sa famille à leur solitude, à leurs espoirs.

La pirogue a repris le fil du courant.

Pendant trois jours nous avons descendu le rio, vu les mêmes placers avec les mêmes peines. Parfois aussi des croix de bois sur une plage, près de cahutes abandonnées. Des jalons délimitent le placer et personne ne s’avise d’enfreindre la consigne qui veut que toute propriété jalonnée soit respectée, même si son propriétaire est malade ou parti en voyage pour un temps indéterminé. Parfois cepen-