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Le « capangueiro » qui a tout prévu et ne tient pas à perdre un travailleur marqué par la chance, lui jette dans les jambes la plus belle fille du pays qui lui croque à belles dents son dernier argent.

Et le soir même, le « garimpeiro » emprunte quelques sous pour racheter son matériel offert à des amis, ou alors, s’il a résisté aux charmes de la belle, il selle son cheval et se prépare à affronter des centaines de kilomètres dans la jungle et les pampas jusqu’à la ville voisine.

Le chemin est long, les accidents arrivent vite, panthères, pumas, loups rouges, serpents,… autant de bonnes excuses pour expliquer un meurtre qu’il est difficile de découvrir sur des ossements épars au milieu d’une piste.

Crime ou accident ? Les gens s’en moquent, et veulent ignorer le drame. Certes, il y a d’autres procédés de brigandage :

— Nous avons des acheteurs, soupire Canario. Ils arrivent dans de beaux canots, bien habillés, bien armés, avec des cadeaux pour la femme et les enfants, mais ce sont des requins. Ils réalisent d’énormes bénéfices sur notre dos. Et puis de toute manière, même si l’on va à la ville, après la vente, les plaisirs ne nous lâchent plus, on a tellement peiné pour gagner cet argent qu’il est naturel de regagner le temps perdu et d’en jouir un grand coup. Après, ma foi, lorsqu’il ne reste rien, on retourne au placer et la vie recommence.

Il faut attendre parfois vingt ans pour avoir à nouveau la joie d’une découverte… on l’attend encore jusqu’à son dernier souffle et l’on crève comme un chien misérable