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à perdre, ou risque tout et si l’affaire fait un peu de bruit, on prend le large. Les mémoires sont courtes.

Ils partent à n’importe quelle condition, me dit Canario, pour des placers dont personne ne voudrait, La police ne s’avisera jamais d’aller les chercher. Mais ils n’aiment pas le travail, ils se lassent et cherchent l’occasion de perpétrer un mauvais coup. Elle arrive, car il est difficile au chercheur heureux de cacher son succès. Lorsque, par miracle, on découvre du beau diamant, le secret serait une torture qui ne serait même pas payée par le prix de la trouvaille. Le village est en liesse, on danse, on boit aux frais de l’heureux chercheur, les revolvers partent tout seuls. Les cris d’allégresse vont réveiller le « capangueiro » [1] qui se précipite, examine la pierre avec sa myopie spéculative d’homme d’affaire avisé. Il calcule rapidement le crédit accordé à l’heureux propriétaire, le déduit de la valeur approximative du diamant et paye. Aussitôt le « garimpeiro » met un billet de cinq cents cruseiros dans le canon de son revolver et décharge le barillet suivant le rituel des chercheurs de diamants.

Le bruit des détonations répercutées de placers en placers annonce à ceux qui peinent que l’un de leurs frères de misère a eu la grande chance de sa vie, la première, sans doute la dernière.

Les chercheurs s’arrêtent un instant et posent leur tamis sur le sable, ils lèvent la tête suivant l’écho de la fusillade, devinent l’endroit de la rivière d’où partent les détonations et se replongent avec une ardeur nouvelle dans leur travail.

  1. Acheteur de diamant et usurier.