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de l’intrus. Puis un gamin s’enhardit, vient tout près de moi, touche les bottes bien cirées, me demande une cigarette qu’il mâche aussitôt avec assurance en lançant de grands jets de salive, puis, d’autorité, il me traine par le pantalon vers une case élevée un peu à l’écart des autres. J’entends des gloussements amusés de femmes derrière les frêles cloisons. Je pénètre dans la case.

Tout d’abord, je ne distingue pas grand’chose, ça sent terriblement mauvais. Puis j’aperçois quatre ou cinq filles assises sur des nattes qui me dévorent du regard et tendent leurs mains comme pour une aumône. Elles veulent des cigarettes. Je fais la distribution. Le gamin parle à l’une d’elles qui semble l’approuver, puis il vient à moi, me montre avec un petit air complice un couple que je n’avais pas encore aperçu, caché sous une couverture et qui se démène d’étrange manière. Ma parole, ils font l’amour. Je demeure pantois. Ma mine prête sans doute à confusion, car avec de petits cris heureux, une femme horriblement tatouée, édentée, et puante, me tend une calebasse pleine de noix amères et de baies sauvages. Interloqué, j’accepte.

Alors, le gosse rassemblant tout son malheureux vocabulaire portugais me dit :

— Senorita ? bonitas ? vingt cruseiros… et il montre dt1 doigt, d’un air superbe, le troupeau de femmes caquetantes. Je ne suis pas un prix de vertu, mais tout de même les beautés locales n’ont pas le don de m’émoustiller et je bats en retraite poursuivi par les cris des femmes indignées et le marmot qui me jette des pierres.

J’ai l’impression de manquer à mes devoirs de gentle-