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corps ont une ligne sculpturale. Quel âge ont-elles ? Quinze ans… Vingt peut-être. Bientôt elles seront comme la vieille qui pose pour mon objectif. Le chef a remarqué mon regard admiratif, il s’approche :

— Pour cent cruseiros, elles sont à ton service, tu sais, elles savent bien danser.

Je sors, écœuré de cet exotisme bon marché.

Après tout, pensais-je, les tueurs Chavantes n’ont pas tellement tort de résister à nos avances mielleuses… qu’ils conservent donc leur indépendance farouche.

Dehors, des chiens rouges et agressifs me reniflent avec insistance, canaris, singes et perroquets, toute une ménagerie puante, minuscule et criarde, se démène sur les toits de palmier de forme ogivale. Le sol est couvert d’immondices, des petits Indiens se poursuivent, une fille aux jambes maigres épouille un garçon qui, béatement, se laisse chatouiller le crâne. A chaque prise la fille pousse un gloussement de plaisir et croque le parasite après l’avoir massé entre ses doigts. Je m’étonne de cet appétit, et intéressé par la manière d’opérer, m’approche. Las… le moutard m’a vu. Il saute sur ses courtes jambes et avec un hurlement terrifié fuit courageusement, laissant la fille mastiquer sa dernière prise. Celle-ci réalise, m’aperçoit, sort de l’hébétude de sa digestion… et se précipite vers moi, les yeux fixés sur ma tignasse jaune abondamment fournie.

Serait-ce que… Non, Dieu merci, elle hésite et, à regret s’éloigne. Je l’ai échappé belle.

Le village est maintenant désert. Parfois une natte se soulève, un œil glisse un regard, s’assure de la présence