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beau billet de cent cruseiros passe de ma poche dans la main du cacique, il est patiemment examiné sur toutes les coutures, comme si le pauvre homme pouvait en vérifier l’authenticité, puis avec un grognement satisfait, il le fait disparaître dans un petit sac qu’il porte attaché autour du cou. Une vieille à la poitrine fanée entre dans la case, à ma vue elle esquisse un mouvement de retraite, le chef la rappelle d’un cri bref, docile elle s’assoit près du foyer et couvre ses cuisses noueuses d’un poncho usé. Dans le village, les Indiens vivent généralement peu vêtus, mais lorsqu’ils vont se ravitailler dans les armazems de Leopoldina ou qu’un étranger les visite, ils se couvrent.

— Tu veux que je prenne ton portrait, chef ?

— Vingt cruseiros.

— Avec tes femmes ?

— Cinquante cruseiros.

Je désigne la vieille qui file du coton sur un métier extrêmement primitif.

— Celle-ci seule ?

— Cent cruseiros.

Cette fois c’est trop, je vais pour sortir, il me rappelle :

— Vingt, dit-il.

J’accepte. Alors avec un grognement, il fait venir la vieille, les autres Indiennes rient, leurs joues sont bleuies d’une barbe fournie et les lèvres ombragées d’une moustache grand style ; bras et jambes sont couverts de tatouages ; elles sont laides et fument une pipe en fuseau, crachant à chaque instant avec l’adresse d’un vieux marsouin. Les cheveux noir de jais sont très longs, huilés et ramenés en frange sur les yeux. La couverture glisse. Les