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Abandonne en secret une cité rebelle !
Et Rome, maintenant, exhale ses regrets ;
Avec lui vont s’enfuir le bonheur et la paix ;
Elle ne pourra plus, l’ingrate, voir encore
Les peuples du midi, du couchant, de l’aurore ;
Et les froids habitants des mornes régions
Que d’un pâle soleil éclairent les rayons,
Aborder avec joie à son pieux rivage,
Pour venir tous les ans lui porter leur hommage ;
D’elle ils s’éloigneront bientôt avec terreur,
Et ne rediront plus son nom qu’avec horreur.
Ô coupable cité, redoute la colère
Qui déjà contre toi s’allume sur la terre !
De nombreux combattants, des bouts de l’univers,
Pour détruire tes murs traverseront les mers,
Et si ce n’est assez pour les réduire en poudre,
En éclats l’on verra sur toi tomber la foudre !
Un volcan, en ouvrant son cratère profond,
T’engloutira vivante en un gouffre sans fond !
Un jour le voyageur errant dans ta vallée,
Quand il découvrira ta plage désolée,
Hélas, en déplorant ta faute et tes malheurs,
Sentira de ses yeux tomber de larges pleurs ;
Recueillant avec soin ta poussière sacrée,
Ainsi qu’une relique antique et vénérée,
Et hâtant son retour vers son heureux pays,
Il ira la montrer tristement à ses fils.
Mais quoi ! s’accomplit-il mon funeste présage !
L’océan a vomi, Rome, sur ton rivage,
Pour punir tes forfaits, d’invincibles guerriers ;
Le sol tremble et frémit sous leurs fougueux coursiers ;
Dans les airs tourbillonne une ardente fumée,
Et la bombe décrit son ellipse enflammée.
De la balle j’entends les aigus sifflements ;
Le boulet destructeur bat les retranchements ;
La brèche s’élargit ; en colonne mobile
Les assiégeants serrés s’élancent dans la ville,
Et Rome a succombé : c’est la troisième fois
Que son aigle est vaincu par le coq des Gaulois.