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Mais voici l’échafaud ! quel moment plein d’horreur !
Il sent, à cet aspect, faillir son triste cœur ;
Il saisit de Jésus l’image consolante,
La porte avec ferveur à sa lèvre brûlante,
Et contemplant le front de ce divin ami,
Il songe que bientôt il mourra comme lui.
De loin brille dans l’air le tranchant de la hache.
Ce fatal couperet tout-à-coup se détache ;
Une tête bondit, roule sur l’échafaud,
Et le prêtre, à genoux, implore le Très-Haut.
En ce suprême instant d’angoisse et de misère,
Détracteur du Croyant, qu’as-tu fait pour ton frère ?
Toi qui parlais si bien de ton humanité,
Qui vantais la douceur de la fraternité,
Qu’as-tu fait, qu’as-tu fait pour calmer son martyre ?
Rien, pour le consoler tu n’avais rien à dire.


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Le soir, dans la bruyère et dans le fond des bois,
Le peuple entend gémir de lamentables voix ;
Les airs sont infectés d’une vapeur mortelle ;
L’oiseau, morne, inquiet, soulève à peine une aile
Qui ne peut soutenir son languissant essor.
Il gémit ; on dirait qu’il voit venir la mort,
Une sombre terreur plane sur la nature ;
Le riche en son palais, le pauvre en sa masure,
Chacun tremble ; soudain le monstre redouté
Apparaît ; devant lui tout fuit épouvanté ;
Il frappe sans pitié la vierge sans défense
Et l’enfant que ne peut protéger l’innocence.
Le fatal instrument qui creuse les tombeaux,
Ni le jour ni la nuit, jamais n’est en repos ;
Du monotone airain gémit la voix plaintive.
Affrontant les dangers d’une funeste rive,
Où se montre partout le spectre du trépas,
Alors que chacun fuit, le Croyant ne fuit pas.
Voyez-le dans ces temps de tristesse et d’alarmes :
À braver le péril il sait trouver des charmes ;
Au chevet du malade il s’empresse toujours ;