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Un tableau désolant a frappé mon regard.
Sur les rochers déserts de l’altier Saint-Bernard,
Un voyageur perdu s’enfonce dans la neige ;
Un froid mortel l’accable et la crainte l’assiège ;
Sa force l’abandonne ; hélas ! il va périr,
Si la main d’un ami ne vient le secourir !
Ô des infortunés divine Providence,
À l’heure du danger viens prendre sa défense !
Seigneur, ne permets pas qu’en ces déserts affreux
Loin de ceux qu’il chérit, périsse un malheureux !…
Franchissant le rocher d’un bond hardi, rapide,
Et promenant partout un regard prompt, avide,
Un Croyant généreux cherche le voyageur ;
Il le trouve et de joie a palpité son cœur.
Sur le bord des torrents, dans la neige glacée,
De la religion sentinelle avancée,
Nous le voyons encore, au péril de ses jours,
À son frère éploré prodiguer son secours ;
Ni les vents déchaînés, ni le profond abîme,
Rien ne peut effrayer son dévoûment sublime.


Séparateur


Dans ma belle patrie il est un heureux coin
Qui de mes tendres jeux fut jadis le témoin ;
Là naquit un Croyant qu’électrisa sans cesse
Un zèle infatigable, une sainte tendresse.
Admirez son courage : il traverse les mers
Pour porter l’Évangile au milieu des déserts.
Il aborde sans arme à des rives lointaines ;
De l’immense Amérique en explorant les plaines,
Affrontant les dangers de ces lieux redoutés
Où la mort à ses yeux s’offre de tous côtés,
Sans crainte il se confie à la frêle pirogue ;
Sur la vague en courroux elle s’élance et vogue :
Hardi navigateur, presque seul, sans secours,
Du grand Meschacébée il remonte le cours.
Bravant à chaque pas la mort et la souffrance,
Soldat sacré du Christ, il sut doter la France
D’un immense pays plein de peuples nouveaux ;