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Vice qui tellement les cerveaux ensorcelle
Que ne pouvons aimer ceste saincte pucelle,
Et celuy qui voudroit d’une parfaicte ardeur (555)
Rendre les beaux effects de sa suave odeur,
Entre tant de complots patronizans au vice,
Entre tant de malheurs des bourgeons de malice,
Il sembleroit qu’il eust amoindri sa raison,
Il sembleroit donner des fruits avant saison, (560)
Qui pourroyent exciter quelque bouche friande :
Si l’appetit n’est sain, dequoy sert la viande ?
On ne doit toutesfois par connivens attraits
Favoriser le vice, et soustenir ses traits :
Car celuy de vertu qui donne le triomphe, (565)
Permet que nostre esprit de la vertu triomphe.
Tous ceux qui ont fiché de l’honneur sur le roc,
Une vaillante palme acquise par l’estoc :
Toux ceux qui ont laissé leur vie à la memoire,
Poursuivant des vertus le guerdon et la gloire, (570)
D’un accord mutuel, et d’un lien estroit
Ont observé la foy, vertu, qui leur monstroit
La guide de leur vie, et leur servoit de corde
Et lien Gordien à l’amour et concorde.
C’estoit le fondement du pilier justicier, (575)
Et l’appui de Phebus, des Muses nourricier :
Mais ores (ô malheur !) elle est fresle et legere,
Ce n’est plus rien qu’un vent de la foy hommagere.
Le Ciel qui nourrit tout, qui couvre tout sous soy,
Juge de nos desseins, juge de nostre foy, (580)
Monstre que qui la pert n’a plus que perdre au monde,
Son esprit sans repos parmy l’air vagabonde,
Ne permettant jamais le mortel impuny,
Qui d’elle se sera traistrement desuny.
» Les fils qui vont dressant les mains contre leurs peres (585)