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Plus grands que les petits, pour l’orage eviter (355)
Du temps, qui à la mort nous vient tous inviter ?
MARDOCHEE.
» Les grands Roys, au regard de l’humble populace,
» Sont comme grands sapins plantez sur l’haute masse
» D’un mont precipiteux,et semble que des bras
» Ils puissent escrouler les fondemens d’Athlas : (360)
» Mais ainsi que plustost le vent les monts attacque :
» Et que le foudre aussi aux plus hauts lieux se bracque
» Les Roys sont plus prochains du tonnerre grondant,
» D’autant que leur grandeur se va plus estendant :
» Le desastre tousjours de nouveaux maux les broye, (365)
» Et s’ils ne sont amis du ciel, il les fouldroye.
Esther, tout les soulas d’Assuere et de moy,
Garentissez le Roy de ce cruel émoy.
En recalmant un peu l’ennuy qui vous moleste
Dites luy où se rend la trahison funeste (370)
Qu’on trame sur sa vie, et moy vivant despoir
J’attendray le bon-heur que je dois recevoir :
Car je croy que mon Dieu n’a destourné sa face,
Pour regarder l’estat de l’Abramide race,
Mais luy tout bon, tout saint, retient volonté (375)
Dans les secrets, archifs de sa divinité,
Et le sçavoir humain n’oseroit pas comprendre
Ce qu’il veut sur l’aimant de son pouvoir estendre
Cest une grande mer, dont le pale nocher,
Si la foy n’a en pouppe, hardy n’est d’approcher, (380)
De son vouloir le glus secrettement attire
D’un grand mal un grand bien, comme nous pouvons lire
Dans le sacré fueillet, car l’aspre affection,
Le meurtrissant dessein, la male intention,
Des freres de Joseph fut à la fin la guide, (385)
Pour le faire honnorer du Roy Ichneumonide,