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II
préface

d’hui, fantôme de rue silencieuse et vide, aux remparts croulants qui semblent découper, dans la nuit, des ombres agenouillées comme pour demander la grâce après la malédiction. »

Et mon arrivée à l’hôtel de Pékin :

« Un lambeau d’hôtel, un spectre, une illusion d’hôtel. La guerre l’a frappé d’étisie. S’il a encore ses quatre murs et son toit, c’est bien juste. Toutes les vitres sont cassées, les escaliers n’ont plus de rampes, les chambres n’ont plus qu’une moitié de porte. Le propriétaire me promet, après beaucoup de recherches, une cuvette et de la colle et du papier pour boucher les trous les plus pressants. Après quoi, il m’introduit dans la salle à manger où déjeunent les six habitués d’avant le siège. Ils viennent là comme à une corvée, les pauvres, sachant bien que des menus d’autrefois, il ne leur restera que le regret.

« Ils s’installent tristes, résignés, devant leur assiette. Je m’installe à côté d’eux. Et voyez comme le hasard arrange les choses : il se trouve que ce sont justement les volon-