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LES CORDELIERS AVANT VARENNES

Les premières en date prennent naissance dans le voisinage immédiat du club, sur l’initiative de ses membres. Le club civique du Théâtre-Français annonce sa fondation au conseil général de la Commune le 19 novembre 1790[1]. Le 15 décembre, deux membres de la section du Luxembourg, Lefèvre et Lebois, dont le dernier au moins est connu pour un Cordelier influent[2], font adopter à leur section une résolution préconisant l’établissement, dans chaque section de la capitale, « d’assemblées gratuites d’instruction pour le peuple. » Les citoyens passifs pourraient y figurer à côté des citoyens actifs. La Commune fournirait gratuitement les locaux nécessaires[3].

Vers le même temps, la société des Vainqueurs de la Bastille, qui comptait parmi ses membres de nombreux Cordeliers, notamment son vice-président, le fameux Santerre, se transformait en « société fraternelle des Amis des droits de l’homme, ennemis du despotisme, séante section de Montreuil » (2 janvier 1791)[4].

Le même jour, 2 janvier 1791, la société fraternelle de la section des Enfants rouges, séante aux Minimes de la place Royale (palais Cardinal), était fondée par Tallien[5]. Tous les citoyens et citoyennes sans distinction y étaient admis gratuitement ainsi que les enfants à partir de l’âge de 12 ans.

  1. S. Lacroix, Actes, 2e s. t. III, p. 54.
  2. Lebois continuera, après le 9 thermidor, l’Ami du peuple.
  3. Voir l’arrêté dans S. Lacroix, 2e s., t. III, p. 54-55.
  4. Les Vainqueurs de la Bastille avaient tenu, dans leur salle de la Boule Blanche au faubourg Antoine, le 19 décembre 1790, une grande réunion épuratoire, au cours de laquelle ils avaient exclu plusieurs de leurs membres convaincus de s’être laissés enrôler parmi les mouchards de Lafayette. Marat publia dans un supplément extraordinaire le procès-verbal de cette séance signé de Santerre. Le 28 déc. 1790, Bailly se vengea en faisant prendre à la municipalité un arrêté qui enjoignait aux Vainqueurs de cesser leurs réunions, sous prétexte que le décret du 6 déc. 1790 interdisait aux corps armés de délibérer. Les Vainqueurs répliquèrent en invoquant la loi du 13 nov. 1790 qui permettait aux citoyens de s’assembler paisiblement et sans armes. Ils décidèrent alors de se transformer en société fraternelle et de s’affilier aux Jacobins. (S. Lacroix, 2e s., t. II, p. 4 1-43).
  5. Date donnée dans l’estampe du Musée Carnavalet, reproduite dans J. Jaurès, La Législative, p. 849. Les Révolutions de Paris annoncèrent la formation de cette société dans leur no du 8 au 15 janvier 1791 (S. Lacroix, 3e s., t. V, p. 340).