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LES CORDELIERS AVANT VARENNES

des Cordeliers devenu bien nationale[1]. IL y resta près d’un an. Ayant cessé de plaire à la municipalité, celle-ci l’en expulsa sous prétexte qu’il ne payait pas de redevances et qu’il ne s’était pas pourvu d’autorisation, en réalité parce que la grève des ouvriers charpentiers battait son plein et que les autorités ne voulaient pas permettre aux ouvriers d’imiter les Cordeliers en se procurant comme eux des lieux de réunion sans frais[2]. Le samedi 16 mai, à 8 heures du matin, les scellés furent posés sur la porte de la salle où s’assemblait le club et sur les salles voisines, les croisées masquées par une cloison de lambris[3], le passage qui longeait le couvent de la rue des Cordeliers à la rue de l’Observance interdit et barré, les portes donnant sur les cloîtres fermées. Pendant un mois, le club erra de salle en salle. Il se réunit d’abord en petit nombre, une vingtaine, dit un de ses membres Dunouy[4], au jeu de paume du sieur Bergeron, rue

  1. C’est à tort que M. Aulard dit que les Cordeliers s’assemblèrent habituellement dans l’église du couvent. L’église était beaucoup trop vaste (820 pieds de long et 90 de large) et n’était pas aménagée. Tous les documents contemporains parlent de la salle où le club tenait ses séances et cette salle pourrait bien être la bibliothèque qui était une des plus belles de Paris. (Cf. Ami du peuple du 17 mai. Orateur du peuple, tome VI, n° 12. Courrier des 83 départements du 17 mai, la brochure Grand dîner des conspirateurs aujourd’hui 6 juillet 1790 dans la salle des Cordeliers, rue de l’Observance, cf. les arrêtés ordonnant la fermeture dans S. Lacroix, 2° s., t. IV, p. 83, p. 231, p. 240-241).
  2. Le 27 avril 1791, le département ordonna à la municipalité de faire fermer les lieux vacants dans les ci-devant maisons ecclésiastiques attendu que des particuliers se permettaient d’y tenir des assemblées sans autorisation. Le 11 mai, le maire Bailly prescrit au major général de la garde nationale, Gouvion, de prendre des mesures, surtout aux Cordeliers, à cause de l’agitation des charpentiers. Il prévient Gouvion qu’un officier municipal, Tiron, avait été chargé de fermer le matin même «les portes de la salle de l’Archevêché où s’assemblent les garçons charpentiers et celles des Cordeliers». Le 12 mai le corps municipal arrêtait que ses commissaires, Oudet et Tiron, se transporteraient à nouveau au couvent des Cordeliers pour y procéder à une fermeture plus complète.
  3. Ami du peuple du 17 mai 1791. De crainte que le club ne s’assemblât dans l’église, dit Marat, les portes en ont été condamnées.
  4. Dunouy, Vérités incontestables… pamphlet écrit en l’an II, réimprimé par M. S. Lacroix, 2° s., t. VI de ses Actes, en appendice. D’après Dunouy, le club se serait transporté, d’abord dans la salle S-Michel (La salle S{{t}-Michel était située dans le couvent des Cordeliers.), où les «forts du port au blé vinrent lui offrir l’appui de leurs bras», puis