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pour vendre plus cher leur argent, pour trouver occasion de faire impunément le monopole et de trafiquer dans le comptoir du sang des patriotes, qu’ils brûlent de verser.

Mais l’on ne sait pas comment les choses tourneront. — Il est très certain que les amis de l’égalité ne souffriront pas toujours qu’on les fasse égorger au dehors et qu’au-dedans on les assiège par la famine. Il est très certains que toujours ils ne seront pas les dupes de cette peste publique, des charlatans qui nous rongent comme des vers, des accapareurs dont les magasins ne sont plus qu’un repaire de filous.

Mais, lorsque la peine de mort est prononcée contre quiconque tenterait de rétablir la royauté, lorsque des légions innombrables de citoyens soldats forment avec leurs armes une voûte d’acier ; lorsqu’elles vomissent de toutes parts le salpêtre et le feu sur une horde de barbares, le banquier et l’accapareur peuvent-ils dire qu’ils ne savent pas comment les choses tourneront ? Au reste, s’ils l’ignorent, nous venons le leur apprendre. Le peuple veut la liberté et l’égalité, la république ou la mort ; et voilà précisément ce qui vous désespère, agioteurs, vils suppôts de la tyrannie.

N’ayant pu réussir à corrompre le cœur du peuple, à le subjuguer par la terreur et la calomnie, vous employez les dernières ressources des esclaves pour étouffer l’amour de la liberté. Vous vous emparez des manufactures, des ports de mer, de toutes les branches du commerce, de toutes les productions de la terre pour faire mourir de faim, de soif et de nudité, les amis de la patrie, et les déterminer à se jeter entre les bras du despotisme.

Mais les fripons ne réduiront pas à l’esclavage un peuple qui ne vit que de fer et de liberté, de privations et de sacrifices. Il est réservé aux partisans de la monarchie de préférer des chaînes antiques et des trésors à la République et à l’immortalité.

Ainsi, mandataires du peuple, l’insouciance que vous montreriez plus longtemps seroit un acte de lâcheté, un crime de lèse-nation. Il ne faut pas craindre d’encourir la haine des riches, c’est-à-dire des méchants. Il ne faut pas craindre de sacrifier les principes politiques au salut du peuple, qui est la suprême loi.

Convenez donc avec nous que par pusillanimité vous autorisez le discrédit du papier, vous préparez la banqueroute, en tolérant des abus, des forfaits dont le despotisme eût rougi, dans les derniers jours de sa barbare puissance.

Nous savons sans doute qu’il est des maux inséparables d’une