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J’entends à nouveau les chants gutturaux et simples, la cadence des pieds nus frappant la terre humide, le sourd tonnerre des longs tambours dont une oreille d’éléphant recouvre le cône de bois dur, tandis que des ramures tombe la stridulation vrillante des cigales innombrables, qu’au loin la forêt retentit des effroyables clameurs du singe hurleur et que du sol de boue monte le chœur coassant des grenouilles et la plainte de cristal des crapauds.


X

Van den Eynde mourut, quatre mois après, à Stanleyville, reprend Coupal. À la fin de la même année, j’étais en Europe, occupé à gaspiller, avec une grosse femme blonde nommée Léa, les quelques billets de mille qui m’avaient été alloués en récompense des millions que j’avais découverts.

Elle prétendait m’aimer d’amour, mais à mon dernier billet, elle m’a vivement lâché, en m’insultant, naturellement.

Un soir, devant elle, je racontai à des camarades, l’histoire de Van den Eynde :

— Et tu n’es pas encore allé chez sa veuve ? fit Léa.

— Ma foi non.

— Eh bien, tu iras demain, et demain matin, tu m’entends… Ah ! je savais bien que tu n’avais pas de cœur !

Il s’agissait évidemment de me montrer qu’elle, Léa, avait du cœur. Et, comme je connaissais son obstina-