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— Non, m’a-t-il répondu bien doucement, à ma place cela ne vous serait pas égal, parce qu’il y a ma femme et ma petite fille…


VIII

Une danseuse accompagnée d’un grand jeune homme au costume blanc raidi d’empois s’en vient au bar près de nous.

Le vent colle sur le corps du boy la mince toile de sa kanzou.

Brusquement silencieuse, la femme le fixe d’un regard continu.

Coupal s’en aperçoit et reprend d’une voix plus âpre :

— C’est alors que Van den Eynde me raconta sa vie.

Le poids d’angoisse était trop lourd pour que son pauvre cœur pût le supporter seul, et le malheureux me dit tout.

Oui, à moi, l’étranger, rencontré par hasard et qu’il ne reverrait plus, il confia tous ses secrets, même les plus intimes, comme cela arrive si souvent en Afrique.

Quand il avait connu sa femme, il n’avait pas vingt ans, elle en avait seize. Il l’avait rencontrée dans une pension où elle était élève, alors que lui, simple peintre en bâtiments, s’y rendait régulièrement pour son travail. Elle était mal surveillée et s’ennuyait dans ce grand couvent triste. Van den Eynde, joli garçon, l’avait séduite et voilà qu’il avait fallu se marier.