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Au-dessus de la porte centrale, entre les trophées de lances, de flèches, de boucliers, de cornes, de queues, de crânes, s’étale en posture de crucifié une peau du fameux okapi, orgueil du club, don de Coupal.

Il l’avait troquée jadis contre du sel, une vieille casquette et quelques paquets de son précieux tabac à Andikweli, chef nu et vagabond d’une tribu de nains plus vagabonds encore.

Une puissance locale, cet Andikweli, car, devant lui, les grands nègres arabisés, groupés par la crainte et l’amour du gain le long des pistes caravanières, tremblent dans les huttes, blanchies au kaolin, de leurs populeux villages.

Les sentences du pygmée, implacablement exécutées dans la forêt près de leurs défrichements sont, en effet, toujours restées sans appel. Les magistrats si zélés à poursuivre les défaillances d’un malheureux blanc perdu en ces pays sauvages, n’éprouvent nul besoin d’ouvrir contre le nain des enquêtes laborieuses qui ne leur vaudraient ni réclame ni, par voie de conséquence, avancement.

Et, de leur côté, les administrateurs territoriaux estiment inutile de vouloir se saisir de l’insaisissable.

Si bien que l’homoncule peut continuer d’assassiner à sa guise et il ne s’en fait pas faute, naturellement.


III

Dans cette salle singulière, au son d’un pianola, quelques couples s’essayent à une danse à la mode ;