Page:Masson – Napoléon à Sainte-Hélène.pdf/77

Cette page a été validée par deux contributeurs.
59
LE BELLEROPHON À TORBAY

parce qu’il « finirait probablement ses jours au milieu des Anglais ».

En arrivant à Torbay, le capitaine Maitland trouva l’ordre d’y attendre les ordres des Lords commissaires de l’Amirauté : nul ne devait monter à bord sans une permission expresse signée d’eux ou de l’amiral. Cela eût pu passer pour une sorte de quarantaine, mais il y avait bien d’autres symptômes : Gourgaud avait reçu défense de débarquer, et rapportait la lettre qu’il devait remettre aux mains du Prince régent ; les journaux, que Maitland avait fait venir de terre, annonçaient ouvertement « qu’on ne permettait à aucun passager de débarquer en Angleterre ». Certains parlaient de la Tour de Londres ou d’un château perdu en Écosse, où l’Empereur serait confiné ; d’autres disaient : « dans le cas où l’on croirait devoir lui conserver la vie, il sera certainement séparé de toutes les personnes de sa suite, que l’on distribuera dans diverses forteresses » ; enfin, le bruit s’accréditait que le lieu de sa destination ultérieure était fixé et que ce serait Sainte-Hélène. Sans doute, au Congrès de Vienne, ce nom avait déjà été prononcé, mais avec d’autres ; à présent, le ministère anglais y revenait, pour des raisons qui n’étaient point toutes diplomatiques. « Nous sommes tous décidément d’opinion qu’il ne faut point résoudre pour le confiner dans ce pays-ci, écrit Lord Liverpool à Lord Castlereagh, le 21 juillet. Des questions légales très délicates se trouveraient soulevées à