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NAPOLÉON À SAINTE-HÉLÈNE

mun n’est point assez fort pour commander à leurs passions ; il faut qu’ils se provoquent et qu’ils s’entre-tuent, et, comme l’Empereur a donné tort à l’agresseur, celui-ci, par O’Meara, fait déclarer au gouverneur qu’il entend quitter Longwood et Sainte-Hélène. Tout aussitôt, il reçoit son exeat ; tout aussitôt, il est installé par Lowe dans une jolie maison en compagnie d’un officier anglais auquel il fait ses confidences ; tout aussitôt, il se répand chez les commissaires étrangers, et reçoit leur hospitalité ; tout aussitôt, il devient le commensal du gouverneur ; et aux uns et aux autres, à qui veut l’entendre, il dit que l’Empereur n’est pas malade, qu’il ne l’a jamais été, qu’il n’a pas les jambes plus enflées que d’ordinaire, qu’il ne souffre pas, qu’il est parfaitement alerte, qu’il pourrait s’évader comme il voudrait et que rien ne serait plus facile. Il parle, dans une sorte de délire — un délire qui persiste pourtant, car il sera pareil sur le bateau qui, directement, sans escale au Cap, le ramènera en Angleterre ; pareil dans le cabinet du sous-secrétaire d’État, M. Goulburn, dans le cabinet de l’ambassadeur de France, le marquis d’Osmond, pareil tant que Gourgaud conservera l’espérance d’être réintégré dans l’armée royale avec son grade d’après Waterloo. Quand il s’apercevra de sa faute — et que ses anciens camarades la lui feront toucher du doigt — il se retournera, publiera un manuscrit sur la campagne de 1815 qu’il a emporté de Sainte-Hélène, malgré que l’Em-