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LE DÉPART DE GOURGAUD

tholon s’étaient trouvés en présence et les alliés d’hier étaient devenus des ennemis irréconciliables. Gourgaud qui, la veille, éprouvait pour Montholon des « sentiments fraternels », ne rêvait plus qu’à le tuer. Tout lui était un objet d’envie et de revendication : la place que Montholon occupait à table, le traitement qu’il recevait, les sommes qu’il le soupçonnait de toucher en Europe ; tout, la préférence que donnait l’Empereur à Mme de Montholon pour une partie d’échecs, les plats qu’on portait aux Montholon lorsqu’ils ne dînaient pas avec l’Empereur, les petites et les grandes choses, s’il en était de grandes en cette misérable vie ! que Montholon n’était pas un officier à comparer à lui Gourgaud, que son ancienneté de grade — à la vérité de quelques jours — ne devait pas compter… et de tout il rendait l’Empereur responsable. Il le signifiait par de la mauvaise humeur, des bouderies, puis des violences, des brutalités, des manques de respect. L’Empereur portait à le calmer une patience d’autant plus admirable qu’elle était moins dans son caractère. Il le flattait, l’amadouait, essayait de le faire rire ; comme Gourgaud se plaignait à tout instant que sa mère n’eût point de quoi vivre, l’Empereur faisait écrire qu’on payât annuellement à Mme Gourgaud une pension de douze mille francs, qui serait réversible sur son fils. Mais, sur ce même papier, il avait fait d’autres recommandations, et Gourgaud, craignant que ce papier ne fût saisi, et que