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NAPOLÉON À SAINTE-HÉLÈNE

Plus haut, les Anglais proclament que Napoléon vivra à Sainte-Hélène jusqu’à ce qu’il y meure ; plus haut, Napoléon doit attester que cette prison où on l’enferme est inique, qu’il n’est prisonnier que par un abus de la force et, à toute occasion, en toute circonstance, élever la voix pour le dire. De même, plus les Anglais lui refusent le titre qui atteste sa dignité, plus il doit le réclamer, le porter haut, l’exiger de tous ceux qui l’approchent : Ce n’est point là, de sa part, un cas où la vanité le guide, c’est l’orgueil, et tel qu’il est élevé à la hauteur d’un principe. Quatre fois élu par la nation française, sacré par le Souverain pontife, et par là, pour tout catholique, seul souverain légitime, reconnu comme tel par tous les empereurs et les rois de l’Europe continentale, son titre est indélébile, comme est le sacre. Les Anglais le lui enlèvent. Ce qui fut l’Empire n’existe point pour eux ; d’un trait de plume, ils ont aboli la consultation nationale, le couronnement, dix années — ces dix années de 1804 à 1814 : il n’y a pas eu d’Empire, et il n’y a point d’Empereur. « Je ne connais pas, écrit l’amiral Cockburn au général Bertrand, la personne que vous désignez sous le titre d’empereur : il n’y a dans cette île personne que je puisse considérer comme ayant droit à une telle dignité, nos pays respectifs étant actuellement gouvernés par des rois. » Si Napoléon tolère d’être ainsi disqualifié, il reconnaît que tout ce qui fut fait par le peuple est inexistant, que le peuple