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NAPOLÉON À SAINTE HÉLÈNE

dance de Montchenus en instance de « surveillance », Claude-Marin-Henri, protégé des consuls Cambacérès et Lebrun, obtint d’être radié. Il vécut à Paris, puis à Lyon et, dans les cafés où il fréquentait, il disait volontiers : « Quand cet homme sera tombé, je supplierai le roi de me rendre son geôlier. » C’était en 1811, M. de Montchenu flairait de loin les désastres et ses ambitions étaient généreuses. On ne les comprit point d’abord. Malgré ses campagnes, son nom et ses services, il ne fut point, à la première Restauration, traité selon ses mérites. Aussi vint-il réclamer à Vienne ! Quoi ? Une indemnité, a-t-on dit, pour des fourrages consommés lors de la guerre de Sept Ans. C’était un insupportable bavard, le gobe-mouches important, espèce redoutable ! Talleyrand l’avait vu et apprécié ; et ce fut Talleyrand qui proposa le marquis, lequel avait rejoint le roi à Gand, pour la place de Sainte-Hélène. Avait-il cédé, comme on a dit, à Mesdames de Jaucourt et de Laval qui s’étaient instituées les protectrices des Montchenu ? cela se peut, il n’avait rien à leur refuser. Toutefois, après avoir promis, il ne se décidait point à faire signer une nomination qui devait sembler une épigramme en actions. Il s’y résolut la veille de sa chute et ce fut là son testament ; le 22 septembre, « le sieur de Montchenu, colonel, fut nommé par le roi son commissaire à Sainte-Hélène » ; le 23, le prince de Talleyrand n’était plus ministre, mais il avait procuré ses maîtres à la risée de l’Europe,