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SIR HUDSON LOWE

qu’il savait qu’il resterait tel et que rien ne ferait qu’il ne fût pas tel ; il a constamment approuvé Lowe d’avoir été tel ; il lui a recommandé expressément de demeurer tel ; pas une fois, durant cinq années, il ne lui a reproché d’avoir aggravé ses instructions ; au contraire, il l’a repris avec une extrême violence de ne pas y avoir porté assez de raideur et d’avoir eu trop de ménagements.

En donnant à Hudson Lowe un rôle majeur, on a faussé l’histoire de la captivité, et, pour ce dessein, l’Empereur, ses compagnons et les écrivains français ont, sans en avoir conscience, uni leurs efforts avec les ministres et les écrivains anglais. On a attiré sur Lowe toutes les haines et on l’a présenté tel qu’il n’était pas. Les Français, à Sainte-Hélène, ne voyaient que lui, subissaient à tout instant son inquisition, étaient l’objet de ses fébriles inquiétudes, souffraient par lui et lui attribuèrent les persécutions dont ils avaient été les victimes. Les ministres anglais, de leur côté, rejetèrent sur cet homme qui ne tenait à rien, qui n’avait ni nom, ni fortune, et qu’ils brisèrent ensuite comme un outil hors d’usage, la responsabilité des ordres qu’il lui avaient donnés ; il plut aux historiens britanniques de sacrifier un concitoyen obscur pour sauver le prestige de la dynastie, de l’administration et de la nation. Lowe est l’effet ; on a mis l’effet en lumière et ainsi a-t-on noyé d’ombre la cause. C’est la cause qu’il faut chercher et la lutte alors vaut d’être racontée ;