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LE COMTE DE LAS CASES

cette caste où Napoléon s’était plu à recruter ses confidents momentanés, dont il recherchait les suffrages et dont il appréciait l’éducation et les manières, il avait cette supériorité de comprendre la langue anglaise, et cela sans que les Anglais sussent qu’il l’entendît. Ils se méfiaient de Madame Bertrand, Anglaise par son père et apparentée à des Anglais, mais comment penser qu’un Français de la suite de Bonaparte eût appris à parler anglais ?

Las Cases, agréé comme secrétaire, en sus des trois officiers concédés par le gouvernement anglais, considéré en inférieur par Montholon et par Gourgaud, brimé dès les premiers jours par celui-ci, qui croyait trouver une victime résignée, allait se relever au premier rang et devenir en peu de temps le seul homme dont la conversation — mieux, dont la façon d’écouter — plût à l’Empereur. Il est celui qui, sans vanterie ni fracas, rend des services essentiels ; car Madame Bertrand, bien qu’elle ait en Angleterre des parents proches, des mieux placés pour la servir, n’a pu, su ou voulu établir avec eux des communications qui fussent utiles à l’Empereur, tandis que Las Cases, par une certaine Lady Clavering qu’il a connue en France, a, dès l’entrée en rade du Bellerophon, formé une correspondance dont le premier résultat semble avoir été l’apparition du terrible porteur du writ. Cette Lady Clavering est Française : on dit chez les Dillon qu’elle fut marchande de modes à Orléans et que sa réputation n’est pas brillante.