Page:Masson – Napoléon à Sainte-Hélène.pdf/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.
100
NAPOLÉON À SAINTE-HÉLÈNE

est vrai, le désirait et elle le disait. » Anglaise de naissance, elle croyait fermement à l’honneur anglais, à l’hospitalité britannique. N’avait-elle point, elle, fille d’un général français, été accueillie par ses parents anglais comme leur enfant ? Au lieu d’un asile, c’était une prison que l’Angleterre réservait à celui qui était venu se placer sous la protection de son pavillon. Et quelle prison ! Mme Bertrand s’affola. Elle écrivit aux ministres « pour qu’ils empêchassent son mari de suivre Buonaparte, assurant qu’il ne le faisait que par honneur et à regret ». On lui répondit que le ministère ne s’occupait pas de ces détails. Alors, elle courut à la cabine de l’Empereur, entra sans être annoncée, fit une scène de larmes, de désespoir et de colère, et, comme l’Empereur répondait à ses objurgations qu’il ne pouvait défendre à Bertrand de l’accompagner, elle se jeta à la mer. Elle fut arrêtée par Mme de Montholon, qui la saisit par une jambe. Mais ce suicide manqué ne la calma point, et, jusqu’au dernier moment, elle s’acharna, employant tous les moyens, les discours, les larmes, les violences pour empêcher Bertrand de remplir son devoir. Il fallut à cet homme un sentiment très vif de l’honneur, une volonté vraiment admirable pour résister ainsi à une femme qu’il adorait ; il tint bon. Toutefois, il concéda une promesse de rester seulement une année, et sa femme en prit acte. « Mon cher cousin, écrivit-elle à Lord Dillon, nous partons pour