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associer à l’espérance des chrétiens, à la communion de ceux qui ont vaincu le monde ; elle vous eût conseillé d’aller vivre parmi ces infidèles qui ne connaissement pas Jésus-Christ, et où le prince du monde se faisant adorer, il est permis d’aimer ce qui lui appartient. Et voilà pourquoi, dans les premiers temps, ceux des catéchumènes qui ne pouvaient encore se résoudre de renoncer au monde et à ses plaisirs, différaient leur baptême jusqu’à la mort, et n’osaient venir contracter aux pieds des autels, dans le sacrement qui nous régénère, des engagements dont ils connaissaient l’étendue et la sainteté, et auxquels ils ne se sentaient pas encore en état de satisfaire. Vous êtes donc obligé, par le plus saint de tous les serments de haïr le monde, c’est-à-dire de ne pas vous conformer à lui : si vous l’aimez, si vous suivez ses plaisirs et ses usages, non-seulement vous êtes ennemi de Dieu, comme dit saint Jean, mais de plus vous renoncez à la foi donnée dans le baptême ; vous abjurez l’Évangile de Jésus-Christ ; vous êtes un apostat dans la religion, et foulez aux pieds les vœux les plus saints et les plus irrévocables que l’homme puisse faire.

Or, quel est ce monde que vous devez haïr ? Je n’aurais qu’à vous répondre que c’est celui que vous aimez ; vous ne vous tromperez jamais à cette marque : ce monde, c’est une société de pécheurs dont les désirs, les craintes, les espérances, les soins, les projets, les joies, les chagrins ne roulent plus que sur les biens ou sur les maux de cette vie : ce monde, c’est un assemblage de gens qui regardent la terre comme leur patrie, le siècle à venir comme un exil, les promesses de la foi comme un songe, la mort comme le plus grand de tous les malheurs : ce monde, c’est un royaume temporel où l’on ne connaît pas Jésus-Christ ; où ceux qui le connaissent ne le glorifient pas comme leur Seigneur, le haïssent dans ses maximes, le méprisent dans ses serviteurs, le persécutent dans ses œuvres, le négligent ou l’outragent dans ses sacrements et dans son culte : enfin le monde, pour laisser à ce mot une idée plus marquée, c’est le grand nombre. Voilà ce