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sion qui les consume petit à petit. Quelques femmes flânent çà et là à la cueillette de fleurs ou de simples tandis que d’autres sont occupées au lavoir qu’elles se sont installé sur la grève caillouteuse. L’ancien ébéniste Johnson, d’un eustache laissé à sa disposition, taille, dans un rôle de platane, des colonnettes curieusement chantournées. Mary-Ann Davis[1] s’ébat sur la grève, avec ses compagnes Martha[2] et Abigail French.

Obediah Rogers, le jardinier, trace, en tous sens, des allées qu’il ratisse incessamment. Là-bas, retiré à l’écart, le front éburné par la méditation, l’âme égale malgré le sort advers, le pasteur Aaron Kellogg s’escrime sur un texte abstrait de Magister Johannes Lockius. Ce révérend à figure ascétique au chef comme nimbé d’une simple couronne de cheveux blancs, qui cogite gravement, ce groupe silencieux, taciturne et qu’on dirait recueilli, cet ensemble, enfin, parait mal situé dans un décor trop animé. Cela jure, cela détonne, cela manque d’harmonie : le cadre ne va pas au tableau. On dirait plutôt un conventicule qui se prépare et dont le modérateur élabore le programme.

C’est la captivité, la nostalgie aiguë, le corps qu’on dépayse, l’âme qu’on châtre, le cœur qu’on asphyxie. C’est l’exil !


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  1. la future Sœur Sainte-Cécile de l’Hotel-Dieu de Québec.
  2. bisaïeule de Mgr Joseph-Octave Plessis.