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la Lussaudière, abandonnait, à son tour, une demi-lieue pour les mêmes fins. La réserve abénaquise proprement dite comprit donc, à l’origine, une profondeur de trois milles sur six de front. Près d’un millier de sauvages abénaquis vinrent de Beaubassin s’établir à Saint-François où ils comptaient trouver la tranquillité et la vie facile au cœur même de la colonie. Disons, pour mémoire, que l’épidémie de vérole de 1701 fit de grands ravages parmi eux.

Certaines des isles dont nous avons parlé étaient utilisées comme stations pénitentiaires ou camps d’internement. En amont, il y en avait une de dimension plus étendue, 8ajomena ou 8ashomena et qu’on avait accoutumé d’appeler Isle du Fort, à cause du fortin bastionné qu’y avait fait construire l’intendant Bochart de Champigny trois ans auparavant. L’Isle du Fort non plus ne faisait pas partie de la réserve et défense avait été faite aux Abénaquis d’y séjourner à cause du magasin à poudre qui s’y trouvait. Les isles ou islets laissés à leur disposition se trouvaient plus en aval, à la tête de la rivière Nikontega[1]. Va sans dire qu’ils avaient aussi congé de pousser plus oultre leurs excursions de pêche et de chasse et ils se rendaient fréquemment à Saurel après avoir traversé la rivière 8amaska[2]. Vers le sud, ils pénétraient fort avant, s’aventurant même, en temps de paix, jusqu’à la baie de Michiscoui[3] dans le lac que les sauvages appelaient encore Pontébonk8é[4] et où, d’habitude, les trappeurs se donnaient rendez-vous avant de se diriger sur Corlard ou sur Fort Orange.

  1. chenal Tardif ou Letardif.
  2. Yamaska ou rivière des savanes.
  3. Missisquoi.
  4. lac Champlain.