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ils servaient de postes avancés ou de corps d’avant-garde qui devaient protéger Kébecq ou le Montréal contre toute surprise de la part des Bastonnais.

Les gladiateurs du cirque, sacrifiés au caprice impérial, tombaient en beauté, saluant César d’un geste tragique, sculptural. L’art s’est chargé de leur apothéose en immortalisant ce qu’avaient de noble ces hécatombes : l’esthétique de la mort, le souci de l’attitude suprême devant le néant. Les modernes ont tenté de faire revivre ce genre de callisthénie ; ils ont abouti à un ridicule pastiche : la pose.

Les boucheries humaines du Nouveau-Monde n’avaient, elles, rien de théâtral. Elles n’étaient pas de style et n’ont inspiré aucun artiste. Les malheureux peaux-rouges tombaient obscurément assassinés dans la brousse pour satisfaire la fantaisie royale et le seul témoin de leur trépas vulgaire était le loup du bois qui, moins classique que le césar romain au pollice verso, hâtait de ses crocs acérés l’agonie des moribonds.

Voilà donc ce à quoi se résumait la diplomatie des chancelleries du temps : s’assurer l’alliance de certaines peuplades pour, ensuite, les opposer les unes aux autres.

Fatalement, ces éloquentes leçons de duplicité données par de pareils maîtres à des disciples fort bien doués sous ce rapport, devaient porter des fruits.

Sans être aussi fourbes, peut-être, que les Iroquois, les Abénaquis n’étaient pas moins vindicatifs et cruels. Savamment fanatisés par les émissaires du pouvoir qui mettaient à profit la cautèle native de ces fils des bois, ces sauvages étaient devenus, à ce dressage assidu que favorisaient, comme nous venons de le dire,