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peut toujours juger de leur plus ou moins de qualité par le degré d’inflexion que mettent les laquais dans leurs révérences.

De quoi s’agit-il donc ?… C’est ce que nous aimerions bien découvrir.

Lecteur, pour peu que vous soyiez débrouillard, nous trouverons bien moyen de pénétrer dans le château. La consigne de faction a l’air homme de bonne composition. Nous est avis que quelques livres tournois — vous en avez tant et plus dans les goussets de votre pourpoint — sauront l’éblouir au point qu’il ne nous verra pas entrer. Le va-et-vient qui règne et le nombreux et obséquieux domestique qui encombre le vestibule favorisent notre projet…

Bon, nous voici enfin dans le grand salon profusément éclairé. Il ne nous reste qu’à nous abscondre derrière les superbes tapisseries de Beauvais si curieusement ramagées.

Ce sont là, à la vérité, des mœurs qui puent la roture, mais nous ne pouvons sensément rester à grelotter sous les fenêtres du château, à dix heures du soir. Et comme c’est l’hiver, on sera bien empêché de nous jeter la première pierre !

À l’intérieur, il fait bon, Dieu merci, de grosses bûches flambent dans le foyer et tout dans l’ameublement et la décoration respire le confortable et le bien-être.

Maintenant, il s’agit de rester cois, tout en examinant, à la dérobée, les personnages qui se prélassent dans les fauteuils moelleusement capitonnés, autour de la table en noyer noir sur laquelle voisinent pêle-mêle bouteilles, carafes, tabatières, drageoirs, etc.

À tout seigneur tout honneur : voici d’abord le maître de céans, Philippe de Rigaud, marquis de Vaudreuil, administrateur de la Nouvelle-France. Les armes de sa maison portent de sable à un