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Cependant, lorsque la lutte s’engagea entre les factions, le peuple s’aperçut que l’arme qu’on lui avait mise entre les mains était chargée à blanc, truquée : la Chambre d’Assemblée délibérait et votait mais c’était, en définitive, l’émissaire de Londres, le Gouverneur, qui détenait le pouvoir.

Incapable de mâter ces frustes « habitants » qui avaient pris goût au régime parlementaire, outré de tant de résistance chez de vulgaires « colonials », Lord Gosford avait pris le parti extrême de violenter la volonté de la Chambre en requérant l’intervention du Parlement impérial. C’est alors que Lord John Russell fit voter, aux Communes anglaises, une série de « résolutions » en vue d’autoriser le gouvernement canadien à passer outre à la « procrastination » de l’Assemblée qui, pour réduire le Conseil Législatif et faire adopter les réformes prônées, refusait de voter les subsides, entre autres la liste civile, au grand ressentiment des bureaucrates consternés de se voir ainsi couper les vivres.

Le mécontentement ne fit que s’accentuer et l’effervescence populaire se traduisit, chez une race primesautière comme la nôtre, par des excès de langage. On parla de brigandage administratif, on dénonça ces forbans, ces bandits qui crochetaient les coffres publics, on déclara que le temps était venu de faire parler la poudre, etc.

De fait, après que les représentants du peuple se furent tus, ce fut la voix mal assurée des vieux mousquets longtemps endormis qui interpréta les imprécations populaires dans cette vallée du Richelieu que, deux fois depuis la Cession, les nôtres avaient conservée à la couronne impériale.

On sait ce qui s’ensuivit…

Bien ou mal avisés — la question n’est pas là — les patriotes de’ 37 furent des héros, précisément parce qu’ils furent braves jusqu’à la témérité et qu’ils eurent un idéal alors que leurs adversaires eurent un intérêt ! Dans le domaine de la pensée et de