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une cause célèbre

Mercier soutenait la thèse que, en faisant servir les cierges à une cérémonie religieuse, Guyon s’en était dessaisi en faveur du culte, qu’il leur avait donné ainsi une attribution spirituelle et que, seule, une désaffection officielle pouvait leur faire perdre ce caractère. Et il ajoutait avec indignation que le défendeur, en portant, sur des objets consacrés par le rite, une main profane, avait commis un sacrilège et causé un scandale, ce qui, à part la peine morale ou ecclésiastique, le rendait passible de dommages-intérêts, ce que son client s’abstenait d’exiger, démontrant ainsi qu’il n’obéissait à aucun esprit vindicatif mais au seul souci de sauvegarder le decorum religieux et le respect du saint lieu. Le défendeur pouvait s’estimer heureux de vivre en un siècle où les mœurs étaient relâchées. Jadis, il aurait subi l’anathème et peut-être l’excommunication majeure, après quoi l’official aurait déféré le mécréant au bras séculier c’est-à-dire à la maréchaussée qui n’aurait pas manqué de le clouer au pilori après l’avoir marqué au fer rouge !

C’était la doctrine des « res sacrae » que développait Mercier. Il partit de la « lex dedicationis » et prouva ou du moins prétendit que de décrétales en constitutions et de canons en capitulaires, le principe s’en était transmis dans tout l’Empire romain pour s’étendre ensuite à toute la chrétienté. L’église de Québec, en passant sous la domination temporelle d’un gouvernement hérétique, s’était vu assurer son entière liberté d’action spirituelle, ce qui comprenait non seulement l’exercice proprement dit du culte mais aussi tous droits et prérogatives accessoires, etc. Il risqua même un rapprochement, qui dût paraître plutôt…étiré, avec la théorie du deodand de l’ancien droit anglais !

Mercier, retranché derrière un véritable rempart d’édits et d’ordonnances, de poudreux in-quartos écrits en « vieil françois », de coutumiers, d’arrêts de parlements, bombardait l’adversaire de toute la jurisprudence désuète tirée exprès de l’arsenal du séminaire pour la circonstance. Les canonistes de tout calibre,