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une cause célèbre

libéral, avait ouvert l’appétit à nos gens. Peu après, Cartier avait fait adopter son bill qui rendait les Cantons justiciables des lois françaises. À la suite de quoi, répondant au manifeste de l’abbé Antoine Racine activement secondé par une phalange (sic) de missionnaires, les Canadiens-français étaient venus en grand nombre s’emparer du sol, achetant de la British American Land Co des lots dont celle-ci s’était fait concéder une vaste étendue (850 000 acres) et qu’elle destinait… à d’autres.

Lucius-Seth Huntington, qui était déjà quelqu’un avant de devenir l’Honorable Solliciteur Général du Bas-Canada, avait su tirer bon parti de l’état des esprits et c’est sans contredit la brillante et vigoureuse campagne qu’il mena dans la presse, à la tribune et au parlement qui fit adopter, en 1857, la législation qui rendait la magistrature sédentaire. L’ancienne loi de judicature de 1849 consacrait ce péripatétisme judiciaire qu’on a, en ces dernières années où la presse rurale n’existe plus, réussi à rétablir au grand dam des campagnes mais au profit des villes où se trouve le gros ou le fort du Barreau. Le législateur s’est montré roué en augmentant, du même coup, le traitement et les frais de déplacements des juges et ceux-ci — le calembour est pittoresque — ont marché !

Le juge Johnson est sans conteste l’un des hommes qui ont fait le plus d’honneur à la magistrature dans notre province. Nous ne lui ferons pas mérite de sa probité ou de son impartialité ; c’est là, à tout prendre, affaire d’éducation et le juge Johnson était probe et impartial comme il était gentilhomme : sans effort, sans application. C’était en plus un bel esprit et un solide dialecticien ; là était son mérite, car cette excellence intellectuelle, si bien doué qu’il fut naturellement, il la devait à l’étude et au travail.

Nous avons connu d’obscurs robins — épiciers fourvoyés dans le prétoire par la mégalomanie — qui tâchaient à se faire un titre de leur indigence intellectuelle en affectant de déplorer