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après le rêve, le réveil
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phrémagog comme l’objectif à atteindre, battait la marche, secondé par un chien d’apparence assez peu engageante que Mr Thomas avait baptisé Craig. Célestin Parent portait un paquet ou ballot contenant quelques couvertures de laine pour se garer du froid et des intempéries, la nuit.

Bien qu’on sût s’engager dans un territoire inconnu et même hostile, les esprits étaient sereins et confiants parce que, le corps reposé et l’estomac avitaillé, on était frais et dispos.

François ne suivit pas longtemps le chemin du lac. Lorsqu’il eut jugé ne plus être à portée de regard de l’auberge, il obliqua à droite et s’engagea dans la forêt. L’on enfonça tant qu’on put à l’intérieur afin de se trouver un bon gîte pour y passer la nuit. À cette époque, le jour baisse tôt et l’obscurité ne tarde pas à tomber sur la forêt touffue. On était toutefois à distance respectable de toute habitation et on pouvait sans crainte faire du feu et s’installer pour la nuit, la première nuit passée à la belle étoile.

La fatigue aidant, on dormit tant bien que mal, tandis que les guides se relayaient comme sentinelles et alimentaient le feu de combustible abondant.

Au petit jour, la marche reprit dans la même direction et, après quelques heures, on aboutit à un « settlement ». Où était-on ? On envoya en reconnaissance le débrouillard M. Saint-Georges qui revint avec la nouvelle qu’on se trouvait à courte distance de Granby.

— Vraiment, nous allions nous fourrer dans un guêpier, disait Thomas. Jamais je n’aurais cru que nous nous dirigions aussi au sud. Décidément, notre plan ment comme Ananias ou bien la boussole a la berlue. Passe encore que notre guide soit sourd-muet, mais il serait plaisant qu’il fut aveugle. Nous mener à Granby ! Moi qui suis borgne, je n’aurais pas fait pis.

Granby, en 1837, avait mauvaise réputation chez les patriotes qui considéraient l’endroit comme infesté de torysme.