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son, sur la Terrasse Dufferin, se gaver les poumons de bon air, écouter la fanfare de la Garnison, contempler la Pointe-Lévy ou la Côte de Beaupré ou même zieuter, sans la moindre pensée de convoitise (j’en mettrais ma main au feu), les belles madames évoluant dans la salle de danse du Château.

Un soir — le 28 juillet vers les 10 heures — Latrime s’était attardé à humer de la fraîcheur. Constatant soudain qu’il restait seul avec une couple de jeunes gens à arpenter la Terrasse, notre retardataire se disposait à reprendre le chemin de son domicile lorsque les deux inconnus l’abordèrent comme il se trouvait à un endroit écarté, l’interpelant de l’ultimatum classique : « Stick’em up ! »

Si peu familier qu’il fût avec la langue anglaise, Latrime comprit, au ton et à l’attitude de ses interlocuteurs, qu’il était invité à lever les mains. Un revolver que l’un des individus pointait vers sa poitrine rendait cette invitation tellement pressante que Latrime crut devoir obtempérer au désir de ces messieurs.

Pendant que l’un des malfaiteurs le tenait en respect, l’autre rafla le contenu de ses goussets. Puis, prestement, les malandrins disparurent dans l’ombre complice des Glacis tout proches tandis que la victime, une fois remise de son émoi, mettait la Sûreté au courant.