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chair de mollet

et soutenir que la Kébécoise, si charmante qu’elle soit, laisse à désirer au physique !

— Toujours, toujours les raisins verts !…

— Imagine-toi qu’il a prétendu que la Kébécoise est non pas petite, ce qui peut fort bien être un compliment, mais qu’elle est courte, tassée, boulotte. Encore un peu et il disait : basse sur pattes !

— Et personne ne lui a imposé silence à ce mufle ?

— Que veux-tu ? Ça n’est pas d’aujourd’hui que l’étranger paie en suffisance les égards de courtoisie et de déférence que lui témoignent les Kébécois. Naïfs que nous sommes ! Avec ça que le bonhomme est un mamamouchi quelconque du monde officiel autour de qui on faisait cercle et dont les rosseries étaient acceptées comme des mots d’enfant terrible. Peut-être est-il en enfance ! Je comptais toujours voir Esther ou Marie-Mathilde lui river son clou, mais non, elles minaudaient toutes deux à qui mieux mieux comme si on les eût muguetées. Peut-être en tiennent-elles l’une et l’autre pour lui.

— Mais Irène n’était donc pas là avec ses 5 pieds 10 pouces et sa sveltesse ?

— Ah ! fais-moi grâce de cet échalas… Toujours est-il que M. Mistenflûte — un vieux nabot au teint violacé avec des gros doigts de saucisse Couillard — s’est permis de passer la Kébécoise en revue de la tête aux pieds. Je te dis que si ça n’avait été du respect qu’on doit aux vieillards, je te lui aurais dit son fait.