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En un même baiser se confond avec elle.

Ô terre bien-aimée ! ô terre maternelle !
Es-tu donc une femme aux yeux d’amour et doux
Qui nous donne à baiser sa main blanche à genoux ?
Es-tu donc une reine au lumineux sourire
Assise sur un trône où parfume la myrrhe
Et qu’éternellement on voudrait contempler
Comme un reflet du ciel dans tes yeux étoilés ?
Es-tu sceptre ou bonté que les fronts les plus rudes
Sans murmurer jamais plient sous ta servitude ?
N’est-ce pas que tes voix, les voix de tes clochers,
Celles de tes ruisseaux sous les taillis cachés
Chantent comme la voix de nos pères et mères
Qui ont compté les jours par leurs heures amères
Et dorment maintenant dans la paix des sillons ?




Pierre, portant le poids de ses déceptions,
Est rentré au moulin. Sa vieille mère est morte,
Le meunier bat de l’aile et se traîne à sa porte.
Il est comme Tobie. Il entend bien la voix
De son fils, mais il le voit à peine, et des doigts
Il cherche sur son front où y poser sa lèvre.
Muette est la maison. Tous deux, comme l’orfèvre,
Sertissent le passé et ils s’en vont à deux
À travers les jardins des souvenirs heureux ;



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