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secret pour le fixer, serait aussi déraisonnable, que chercher la pierre philosophale ou la panacée universelle ; et cette découverte servirait aussi peu, ou pour mieux dire, nuirait autant au genre-humain. Le lien le plus sacré de la société est l’amitié, vérité reconnue par le satyrique, qui a raison de dire : « quelque rare que soit le véritable amour, l’amitié véritable est encore plus rare » ; C’est une vérité toute simple, et la cause n’en étant pas très-cachée, ne peut échapper au plus léger coup-d’œil de l’observateur. L’amour, cette passion ordinaire, où le hasard et la sensation remplacent le choix et la raison, est ressenti jusqu’à un certain point par la masse du genre-humain ; car il est inutile, quant à présent, de parler des mouvemens qui s’élèvent ou descendent au-dessus ou au-dessous de l’amour. Cette passion naturellement augmentée par l’inçertitude et les obstacles, tire l’ame de son assiette ordinaire et exalte ses affections ; mais la sûreté de la possession de l’objet qu’on recherchoit, amenée par le mariage, laissant tomber la fièvre de l’amour, cette température que comporte la santé, paroît insipide. J’avoue