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au lieu de pencher leur tête surchargée du poids de la sensibilité qui consume la beauté à laquelle elle avoit d’abord donné de l’éclat. Je doute même qu’il y ait autant d’affinité entre la pitié et l’amour, que les poëtes l’ont imaginé ; car j’ai rarement vu beaucoup de compassion pour les Femmes malheureuses, à moins qu’elles ne fussent jolies ; alors peut-être la pitié étoit la douce suivante de l’amour ou le proxénete du libertinage.

La Femme qui gagne son pain, en remplissant quelque devoir, combien n’est-elle pas plus respectable que la beauté la plus accomplie ? — Que dis-je, la beauté ! — Je suis tellement sensible à la beauté du caractère moral, à cette harmonieuse propriété qui règle les passions d’un esprit bien ordonné, que je rougis d’en faire la comparaison ; mais je gémis de voir un si petit nombre de Femmes viser à cette dignité morale, en s’arrachant au tourbillon ennivrant du plaisir, ou à cette indolence, qui paralyse leurs bonnes qualités.

Cependant, vaines de leur foiblesse, il faut toujours qu’elles soient protégées,