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regards, la crainte et l’aversion nous rendant plus sévères que l’homme ne doit l’être, un zèle aveugle peut nous faire usurper le caractère de la toute-puissance, et vouer tous nos frères à la réprobation, sans songer qu’il nous est impossible de lire dans les cœurs, et que nous portons en nous-même les semences cachées des mêmes vices.

J’ai déjà remarqué que nous attendons de l’instruction plus que la seule instruction ne sauroit produire ; car, au lieu de préparer les jeunes gens à combattre avec dignité les maux de la vie, à acquérir la sagesse et la vertu par l’exercice de leurs propres facultés, on accumule préceptes sur préceptes, et l’on demande une obéissance passive, quand il faudroit convaincre la raison.

Supposons, par exemple, qu’une jeune personne, dans la première ardeur de l’amitié, défie l’objet de son affection, quel mal peut-il résulter de cette méprise enthousiaste ? Peut-être est-il nécessaire que la vertu paroisse d’abord sous une forme humaine, pour s’imprimer dans les jeunes cœurs ; le modèle idéal qu’un es-