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deux extrêmes. J’ai creusé ce raisonnement jusqu’au point d’en conclure que les gens d’esprit sont les moins propres à être employés à l’éducation publique ou privée, car ces sortes de gens voyent les choses trop en masse, et rarement ont-ils un bon naturel : cette gaîté habituelle qu’on appelle bonne-humeur, est aussi rarement unie à la force intellectuelle qu’)à la profondeur des sentimens. Ceux qui suivent avec intérêt et admiration le vol du génie, ou qui cherchent à s’instruire par les méditations d’un profond penseur, ne doivent pas se rebuter, s’ils trouvent le premier colère, et le dernier morose, car la vivacité de l’imagination et l’opiniatreté méditative de l’esprit, sont à peine compatibles avec l’urbanité flexible qui montre de la déférence pour les opinions et les préjugés, au lieu de les affronter brusquement.

Mais quand on traite de l’éducation morale, il faut faire abstraction des esprits d’un ordre supérieur ; ceux-là peuvent être abandonnés au hazard ; c’est la multitude, ce sont les gens d’un esprit ordinaire qui appellent l’instruction et