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prétends pas qu’on doive les tirer du sein de leurs familles, du moins pour la plupart. « Celui qui a une Femme et des enfans, dit Bacon, a donné des ôtages à la fortune ; car ce sont des obstacles aux grandes entreprises, vertueuses ou criminelles ; aussi les meilleurs ouvrages en tout genre, ceux dont le public a tiré le plus d’avantage, sont-ils dûs à des célibataires ou à des hommes mariés qui n’avoient point d’enfans ». J’en dis autant des Femmes. Mais le bonheur de la société ne doit pas dépendre d’efforts extraordinaires ; et plus son organisation sera raisonnable, moins on y sentira le besoin de grands talens ou de vertus héroïques.

Ce qu’il faut pour bien régler une famille et élever des enfans, c’est un bon sens que les préjugés du monde n’ayent point altéré : un chef de maison a besoin de force de corps et d’ame ; cependant les écrivains qui ont le plus vivement travaillé à attacher les Femmes à leur intérieur, ont essayé, en employant des raisonnemens dictés par un égoïsme que la satiété avoit rendu difficile, d’affoiblir leurs corps et