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quent, quelle part de la somme totale de travail incorporée dans un livre de filés, par exemple, est due à la quantité de travail précédemment incorporée dans la broche. Pour notre présent objet nous n’avons pas à nous arrêter plus longtemps sur ce point.

Il pourrait sembler que si la valeur d’une marchandise est déterminée par la quantité du travail consacré à sa production, la marchandise aura d’autant plus de valeur que l’ouvrier qui l’a faite sera plus indolent ou plus maladroit, puisqu’il y aura travaillé plus longtemps. Ce serait pourtant une grosse erreur. Rappelez-vous que j’ai employé l’expression de « travail social », et cette qualification implique bien des choses. Quand nous disons que la valeur d’une marchandise est déterminée par la quantité de travail « cristallisé » qu’elle contient, nous entendons la quantité de travail qu’il faut pour la produire en un état de société donné, en de certaines conditions sociales moyennes de production, avec une moyenne sociale donnée d’intensité, et une moyenne d’habileté du travail employé. Quand, en Angleterre, le métier mécanique vint faire concurrence au métier à bras, il ne fallut plus que la moitié du temps de travail antérieur pour transformer une quantité donnée de filés en un mètre de cotonnade ou de toile. Le malheureux tisserand qui continuait à se servir de l’ancien métier fit des journées de dix-sept et dix-huit heures, au lieu des neuf ou dix qu’il faisait auparavant. Et pourtant le produit de vingt heures de son travail ne représenta plus que dix heures sociales de travail, les dix heures socialement nécessaires