Page:Marx - La Lutte des classes en France - Le 18 brumaire de Louis Bonaparte, 1900.djvu/282

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
264
la lutte des classes en france

vie sociale semblaient menacer l’« ordre », comment pouvait-elle prétendre mettre à la tête de la société le régime du désordre, son propre régime, le régime parlementaire qui suivant l’expression d’un de ses orateurs ne vit que dans la lutte et par la lutte ? Le régime parlementaire n’existe que par la discussion ; comment pourrait-il l’interdire ? Chaque intérêt, chaque institution sociale y est transformée en idée générale, y est traitée en idée ; comment un intérêt, une institution quelconques pourraient-ils se mettre au-dessus de la pensée, s’imposer comme article de foi ? Le combat oratoire à la tribune appelle la polémique de presse, les débats de clubs dans le parlement se complètent nécessairement par des débats semblables dans les salons et dans les cabarets, les représentants qui en appelaient constamment à l’opinion publique, donnaient le droit à cette opinion de s’exprimer réellement dans les pétitions. Le régime parlementaire s’en remet sur tout à la décision des majorités, comment les grandes majorités extérieures au parlement s’interdiraient-elles de décider elles aussi ? Quand au sommet de l’État on râcle du violon, il faut s’attendre à ce que l’on danse en bas.

Ainsi donc la bourgeoisie, en taxant d’hérésie socialiste ce qu’elle avait autrefois célébré comme libéral, avoue que, dans son propre intérêt, elle doit se soustraire au péril du gouvernement personnel. Pour que le calme règne dans le pays, il faut avant tout que son Parlement bourgeois soit